S-232: Loi sur une approche axée sur la santé en matière de consommation de substances

 

Honorables sénateurs, je suis ravi d’ajouter mon appui au projet de loi S-232. D’entrée de jeu, je tiens à rappeler à mes collègues que, depuis sept ans, nous sommes aux prises avec une urgence de santé publique qui ne montre aucun signe de ralentissement. Je parle de l’urgence de santé publique liée aux drogues toxiques qu’a déclarée la Colombie-Britannique en 2016, année au cours de laquelle on a enregistré 19 275 appels signalant une surdose ou un empoisonnement dans ma province.

Malheureusement, cette déclaration était prémonitoire. Le nombre d’appels signalant une surdose ou un empoisonnement est passé à 23 441 en 2017; à 23 662 en 2018; à 24 166 en 2019; et à peine quelques années plus tard, en 2022, à 33 654. On a enregistré une baisse de 5 % de ces appels en 2021 et 2022, mais je pense que vous conviendrez qu’il est choquant et inacceptable de compter plus de 30 000 signalements de cette nature en une année.

Au début de l’année, Santé Canada a accordé une exemption à la Colombie-Britannique, au titre de la Loi réglementant certaines drogues et autres substances, pour la période allant du 31 janvier 2023 au 31 janvier 2026. Cette exemption prévoit qu’en Colombie-Britannique, les adultes ne feront pas l’objet d’accusations criminelles pour la possession de petites quantités de certaines drogues illégales. Selon le gouvernement britanno-colombien, la décriminalisation n’est pas associée à une augmentation de l’utilisation des drogues. Par ailleurs, on s’attend à ce qu’elle contribue à réduire les obstacles et la stigmatisation qui empêchent les consommateurs d’avoir accès à des services et à des mesures d’appui susceptibles de leur sauver la vie.

La ministre de la Santé mentale et des Dépendances de la Colombie-Britannique a déclaré qu’aucune preuve ne donne à penser que la décriminalisation de la possession de 2,5 grammes ou moins de drogues illicites pour les personnes de 18 ans ou plus mène à une augmentation de la consommation de ces substances dans les lieux publics.

Comme je l’ai mentionné précédemment, cette exemption est entrée en vigueur à la fin de janvier, pour une période de trois ans. Cet exemple de mesure mise en œuvre dans ma province, la Colombie-Britannique, me motive à appuyer le projet de loi de la sénatrice Boniface, qui vise à établir une stratégie de décriminalisation de certaines substances illégales. Je tiens toutefois à souligner que la décriminalisation de ces substances ne peut pas constituer une mesure isolée : elle doit s’accompagner de structures de soutien et d’un approvisionnement en drogues sûr, afin que les consommateurs de substances ne soient pas laissés en plan.

On a déjà beaucoup dit que la crise est grave non seulement dans ma province et dans les grandes villes du pays, particulièrement à Vancouver et à Toronto, mais aussi, comme la sénatrice Boniface nous l’a rappelé, dans de petites localités et dans toutes les régions du pays, en fait. Je tiens à souligner que les troubles liés à la consommation de substances représentent un enjeu de santé publique et non un enjeu de justice pénale.

Les membres du Groupe d’experts sur la consommation de substances ont recommandé à l’unanimité la fin des sanctions pénales liées à la possession simple de substances contrôlées. Nous devrions nous appuyer sur leur recommandation pour encourager le gouvernement à poursuivre l’élaboration d’un cadre en ce sens. Des données probantes démontrent, comme on l’a constaté en Colombie-Britannique, que décriminaliser la possession simple est une façon efficace de réduire les effets nuisibles de la consommation de substances pour la santé et la sécurité publiques.

Il faudra toutefois trouver des façons de remplacer les sanctions pénales, une tâche qui requiert des partenariats intégrés et l’accès à des mesures de déjudiciarisation. Mentionnons que la déjudiciarisation :

[...] peut avoir des répercussions communautaires positives comme la réduction de la récidive et de la criminalité accessoire et l’amélioration des conditions de santé et de sécurité des personnes qui font l’usage de substances illégales [...]

C’est ce qu’on peut lire dans le préambule du projet de loi de la sénatrice Boniface. J’appuie sans réserve toutes ces propositions.

Le projet de loi à l’étude est inscrit au Feuilleton depuis 2021. Quatre ou cinq sénateurs ont déjà pris la parole à son sujet. Il est grand temps de renvoyer ce projet de loi au comité pour une étude en profondeur.

Chers collègues, une crise de santé publique fait rage au Canada. Elle ne cessera pas d’elle-même et elle ne disparaîtra pas par magie. Il faut prendre des mesures concrètes pour arriver à de nouvelles approches permettant de régler ce problème infernal.

Sur ce, je termine ma brève allocution, Votre Honneur, et j’invite tous les sénateurs à réfléchir à la possibilité de renvoyer le projet de loi le plus rapidement possible au comité. Merci.

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